Voilà un article écrit il y a bientôt 3 ans … À l’heure où Vie de voyages reprend du service et où mes pas d’aujourd’hui reviennent sur les traces de ceux d’hier, il me semble de circonstance de le publier !
Au mois de Septembre, j’ai par deux fois fait cette expérience. Revenir.
Revenir à Paris
Un an après quasiment jour pour jour. Retrouver mes chers amis qui restent proches du cœur malgré la distance, les voyages, la vie qui s’écoule. Retrouver avec des airs de vacances la ville lumière qui me plaît tant. Buller le long des berges de la Seine. Avoir le souffle coupé par Notre Dame soudain devant moi. Revenir c’est retrouver ce qui est connu, ce qui est chéri, cette carte postale bien rangée dans les tiroirs de la mémoire et qui a parfois un peu jauni, mais qui garde le charme d’antan.
Revenir c’est aussi retrouver ce qui était oublié. Une ruelle. Un parfum. Une boutique. Revenir … Revenir c’est aussi l’occasion de découvrir de nouvelles choses, de nouveaux endroits. A Paris, j’ai découvert – redécouvert ? Ma mémoire n’est pas toujours la plus fidèle – le parc Montceau, son cadre bucolique, la cour de récréation de l’école à côté. J’ai aussi pris le temps de me promener autour du lac Daumesnil au bois de Vincennes. La cascade et la grotte sous le kiosque situé sur l’îlot central peuvent paraître artificiels et ridicules mais j’imaginais tout à fait l’étoffe des robes de l’aristocratie de la fin du XVIIIème siècle parcourir ces pierres alors que l’on s’entretenait à voix basse.

Revenir, c’est se donner l’occasion d’être touriste de nouveau, même dans des lieux familiers. Lever les yeux au ciel et, comme à Barcelone, remarquer les petits détails des façades, ceux-là même que les yeux fatigués par la routine ignoraient complètement quand cette ville était ma résidence. Mais revenir c’est être touriste sans avoir besoin de visiter les attractions incontournables. Prendre le temps de marcher le long de la promenade plantée dans le 12ème et voir les immeubles d’un autre point de vue. Buller au bord du bassin de la Villette. Mais cela n’empêche pas de prendre du plaisir à admirer de nouveau la Tour Eiffel, de déguster une glace Berthillon, de regarder les gens passer devant le Centre Pompidou.
Et puis revenir. Revenir à Prague.
Un an et demi après cinq jours de tourisme romantique. Pour y rester quatre mois, y vivre, devenir une locale. Revenir, c’est retrouver l’émerveillement teinté d’une pointe d’orgueil « moi je connais déjà ». Eviter la foule du pont Charles. Regarder les gens s’amasser devant l’horloge astronomique à l’heure pleine. Admirer la vue depuis Strahov sans devoir prendre une photo – mais parce que c’est si beau, je le fais quand même …
Revenir, c’est relever le voile de la mémoire, faire voler la poussière accumulée qui ternissait les couleurs sans pour autant effacer les traits. Revenir, c’est remettre ses pas dans ceux du passé, essayer de retrouver l’état d’esprit, les impressions, les sensations. Revenir c’est voir ce qui a évolué, dans la ville et en soi. Le prix du trdelnik a augmenté. Ce n’est pas encore le temps du marché de Noël. Je vois la vie différemment. Revenir, c’est réaliser ce qui était et qui n’est plus.
Revenir, c’est avoir le temps de prendre le temps différemment, connecter des endroits qui existaient séparément dans mon esprit. Revenir …

Et puis revenir pour plus longtemps revêt également un sens différent. Parce que je réalise qu’en cinq jours de tourisme, bien que pas intensif, j’avais fait le tour de nombreux points d’intérêts. Mais qu’il est tout de même agréable de prendre plus de temps pour les apprécier, d’y revenir encore et encore, de voir la lumière et l’atmosphère changer. Parce que je m’habitue aux endroits, aux bâtiments. Parce que je connais des raccourcis et que je sais retrouver mon chemin dans la ville. Parce que je reste assise dans le tram après l’arrêt « Prasky Hrad » (le château de Prague). Parce que je connais quelques bars sympas pour un verre avec vue ou dans une bonne ambiance.
Et même si revenir pour plus longtemps à Prague signifie que certains jours, je ne remarque même plus la cathédrale Saint Guy, le pont Charles ou Rudolfinum lors de mon trajet vers le bureau, il reste tous les moments où je me sens tellement chanceuse d’avoir à vivre ces quelques mois dans une si belle ville et dans des conditions aussi privilégiées. Je sais maintenant que chaque endroit garde la trace de nos passages et qu’il suffit de revenir pour retrouver un souvenir même fugace, mais souvent plus intense que celui que la mémoire ensevelit. Mais je profite de chaque instant parce qu’il ne sert à rien d’attendre de revenir, il faut vivre le moment présent.